lundi 7 septembre 2009

Poésie tire-lyre






ZZZZZ
Dit l’abeille butineuse
Astucieuse maraudeuse
Poétisant de suc à miel
Virevoltant à l’essentiel

Poésie
Tire lyre
Z’y va ou z’y va pas ?

Ze moule aux mots et je m’enlize
Ze clame et déclame à haute doze
Ze me brise les méninges à la proze
Ze frise de cap en pieds l’overdoze
Ze pèze mes lignes consciencieuze

Poésie
Tire lyre
Z’y va ou z’y va pas ?

Z’y court z’y vole z’y pégaze
Ze prends à mon cou mes zailes
Ze pot pourri les mots balèzes
Ze crie ze t’aime en rimes de braize
Ze zozotte des vers à pieds de douze

Poésie
Tire lyre
Z’y va ou z’y va pas ?

Poésie
Elle est la délicieuse écrémeuse du temps
Celle qui voyage sur les ailes des vents
Le cri de la fauvette à montée de gamme
La flèche qui vise droit au cœur de l’âme
De plume à oreilles le sésame des jours
Respire espoirs désespoirs, amour toujours
Musique en toutes langues, universelle
Aux frontières et barbelés, inconditionnelle
Surgit avec la révolte des opprimés
En planque, sous le manteau, lignes imprimées
Ne paye pas, ne se vend pas, luxe suprême
Survit au creuset des misères extrêmes
Superflue soufflant la vie au bord des lèvres
Pour une trace de miel rayon d’orfèvre

Poésie
Tire lyre
Z’y va ou z’y va pas ?

Ze kamikase on ze net sans périphrazes
Ze cède à l’emphaze quand ze m’embraze
Ze jaze sans queue ni tête en motte-raze
Ze tirelire vide quand pas de gaz
Ze zozotte, m’envaze et m’écraze, naze

Poésie
Tire lyre
Z’y va ou z’y va pas ?

Poésie,
Voyageuse sans bagages
Dentellière de nuages
Brodeuse de rêves
Fileuse sans trêve
Sur chaîne et trame
Au creux des lames
De fond
Aiguillon
Poésie
Tire lyre

lundi 31 août 2009

Amants




Amante
Mange-tout
Touche-à-tout
Les années volent effrontées
Au chaud de l’automne en été
Le temps à pourfendre
Les heures à surprendre
Les jours à perdurer
Le fatras des certitudes à couturer
Chaque minute plaisir
Chaque seconde désir
Sueur à la brûlure de 15 heures
27 degrés à la nuit de 24 heures

Amant
Mandoline
Masculine
Goût café sueur de ta peau
Goutte à goûte suit le tempo
Clore les yeux velours
S’ouvrir au contre-jour
Corps lisse de pêche salée
Glisse languide sous la main étoilée
Plus aucun regret ne court
Plus aucun remord ne sourd
Prendre le temps de se dévorer profond
S’alanguir longuement sens en ébullition

Amants
Ébahis
Accomplis
Abandonner le tricotage
De pensées en sabordage
Se rire des on-dit
Gommer les interdits
Des cheveux aux orteils
La sensualité glisse vague vermeille
Juste là sans contraintes
Juste là dans l’étreinte
La joie brute livrée aux amants aimantés
D’un été chaud brûlant offert à déguster







dimanche 9 août 2009

Et Dieu créa le verbe


Dans le grand Tout, Dieu s'ennuyait ferme, et ses anges avec.
Contempler les étoiles par le petit bout de la lorgnette finit par être fastidieux.
Passer des soirées entières à s'exclamer:
« oh! la belle blanche »
« tiens, je n'avais pas remarqué celle-ci, légèrement rosée »
« Moi, je préfère le bleuté, mais, bien sûr, les goûts et les couleurs… »
« assez réussi cet effet de brume, on dit flou artistique, je crois »

Quant à la musique céleste, n'abordons pas le sujet, Dieu pourrait se vexer: quelques chuchotis, des tintements, de rares sons célestement clairs, même les anges s'en lassent.
Dieu feignait de ne rien voir.
Les plumes des Anges ternissaient d'ennui, commençaient à se détacher de leurs ailes.
Lucifer se frottait les mains dans son antre:
- A ce train là, tous ces aériens ne feront pas long feu !
Alors Dieu, grand responsable du Tout, retroussa ses manches et se mit au travail.
Il ouvrit grand la porte de son Imaginaire et Il créa, créa, créa….
Quand il eut fini, une question se posa. Où déposer toutes ces créatures?
 Dieu s'étant laissé déborder d'enthousiasme, le ciel grouillait d'une multitude de choses et les Anges se prenaient régulièrement les ailes dedans.
Notre Grand Responsable repéra une petite boule très insignifiante qui roulait sa bosse autour du soleil en toute discrétion. Dieu pensa:
« Superbe décharge à ciel ouvert! » et il y déposa tout le fatras qu'il avait bricolé.
Il se frotta les mains et admira son œuvre. Ça grouillait, s'agitait, bref, ça vivait.

Après 7 jours à bosser sans discontinuer, Dieu s'aperçut qu'il avait les mains sales, couvertes de glaise. Son Aura ternissait sous la couche de poussière.
Un brin de toilette plus tard, Il héla les Anges (une création a besoin d'admirateurs pour exister, sinon..).
Grandiose, Il annonça:
- Venez voir ce que j'ai créé, une vraie révolution culturelle! J'ai commencé par… ensuite j'ai pensé à…maintenant, vous pourrez voir…
Enfer et damnation !
Oui, vous avez bien entendu, Dieu jura et resta coi.
C'était le premier grand COUAC de l'univers.
Si Dieu en avait créé des tonnes, dans l'infiniment grand, dans l'infiniment petit,et, pour s'y retrouver dans ce grand bazar terrestre, il avait besoin de mots.
Dieu, sage entre les sages ferma son Auguste bouche.
Pour désigner la terre, il s'en sortit par un ample et majestueux mouvement de sa main droite.
Les Anges applaudirent poliment.
Le spectacle étant divertissant et renouvelé sans cesse, tout le monde oublia l'incident.
Le temps passa.

Sur terre, c'était un tintamarre de crrr, de grrrr, de plop-plops, de glouglous, de cuicuis, et j'en passe. La gent terrestre inventait sans cesse de quoi vous casser les oreilles.
Les Anges, eux ne savaient plus causer qu'en termes de « choses », « bidules », « trucs » « machins » pour désigner créatures et choses nouvelles.
Sur la terre, les bestioles jasaient, les Anges manquent un peu d'imagination, pensait-on.
Ils ne connaissaient même pas les vertus du « schtroumf » solution des situations langagières désespérées.
Le pire arriva:
Quand ils pouvaient pas se faire comprendre, les Anges trépignaient, tempêtaient, se traitaient de noms d'oiseaux (pourtant ils ne connaissaient pas la fin de cette histoire) Ils s'étaient mis à montrer les "choses"du doigt, comme des pas polis.
La cacophonie gagnait les cieux et tout ça, par la faute de cette "chose" ronde qui s'était même relookée en bleu, et qui tournait, tournait sans jamais s'arrêter, dévoilant malicieusement à chacun de ses passages des créatures que même Dieu ne se souvenait plus avoir modelées.
Il se maudissait maintenant d'avoir cédé à son délire.
Tout ça par pêché d'orgueil, juste pour prouver à Belzébuth qu'il était assurément plus doué que lui, qu'il n'y avait qu'un seul Créateur dans le grand Tout, et que c'était Lui, Dieu.
L'autre, l'enfer-mé était tout juste bon à faire griller des merguez, et encore, quand elles n'étaient pas calcinées! A force de vouloir flamber aux yeux des angelotes, le feu avait gagné tout le terrain et tout le monde savait que tout ce qui y pénétrait y brûlait éternellement.
Les angelotes ne risquaient pas d'aller y roussir leurs ailes!

Mais, revenons à nos moutons- je veux dire à nos bêêê bêêê-
Dieu, dépassé par les évènements, décida de s'octroyer un jour de repos  (pour récupérer qu'il annonça)
C'était en fait pour que les Anges arrêtent de se battre des ailes et y laissent des plumes: des anges déplumés, c'est pas terrible pour l'image de marque du Tout.
Son observatoire lui avait signalé que des bruits terrestres circulaient « travailler plus , oui mais pour gagner quoi? »
Et si la rumeur gagnait le ciel,vous imaginez?
Les Anges, se penchèrent sur leurs pupitres, s'organisèrent en commissions et sous-commissions, dépêchèrent des missions sur le terrain. Débats plutôt houleux, dit-on mais à part de sérieuses migraines sous les auréoles, nos anges n'arrivèrent à aucun résultat.

Satan se rengorgeait:
« grilleur de merguez qu'il a dit l'Autre, rira bien qui rira le dernier.

Heureusement, Saint-Pierre - qui détient la clé de Tout, y compris des problèmes épineux- se décida à intervenir
« Une chose après l'autre S.V.P. Sérions, classons, nommons »

Toi, lecteur tu penses « Bof!, facile », évidemment maintenant que tout est réglé…quoique… Mais laissons travailler ceux qui travaillent.

Les anges, guidés par Saint-Pierre décidèrent d'un commun accord de commencer par ce qui vole et porte plumes. Ça, on connaît, pensaient-ils.
Trouver un nom, trouver un nom…..Nos Anges cogitèrent dur:
- Nous avons chacun un nom, celui que nous portons depuis la Création
- Pas si simple, il y en a qui en ont plusieurs, regarde sur Twiter ou Facebook
- tu parles de noms propres?
- Oh, commence pas à m'insulter!
- Finies les querelles, sinon on n'y arrivera jamais, intervint Saint-Pierre
- Si nous cherchons un nom pour chacun d'ici-bas, on ne s'en sortira jamais.
Vous avez oublié un détail, Dieu ne se sentant plus d'enthousiasme avait décrété attendri en contemplant son œuvre « Croissez et multipliez ». Ils ont suivi la consigne plutôt deux fois qu'une. Regardez donc en bas, vous constaterez les dégâts.(réflexion pertinente d'un Ange en rébellion)
-Reprenons! dit Saint-Pierre à nouveau.
Pour les noms propres, on laisse tomber. Que chacun se débrouille. Occupons-nous de l'essentiel de notre mission.
Classons et nommons, non de nom!
Pour dépasser cette situation, je vous propose d'en revenir à nos trucs en plumes.
Et jugeant qu'il ne faut point trop abuser du jeu démocratique, Saint-pierre désigna un Ange qui discutait sûrement de bien d'autres choses avec son voisin:
- Vous, oui, vous là-bas, dessinez 6 signes, au hasard (pas 7, cela eût fait de l'ombre à Dieu)
L'Ange s'exécuta; Il arracha une superbe rémige de son aile et traça sur le sable céleste ronds, bâtons, ondulations, toutes formes observées sur la terre,

O I S E A U

Émerveillement général.

Saint-Pierre, fier de son triomphe lâcha inconsidérément
- Magnifique! Nous dirons maintenant:
OISEAU, bête à plumes, vivant dans la nature, fragile, créateur de musiques mieux que célestes, pratiquant le vol libre, capable de franchir terres, mers et océans sans pétrole

Les têtes des anges se décomposaient sous ses yeux
Une petite voix s'éleva pour protester:
- J'ai bien observé au cours de ma mission. Il y en a des gros, des petits, des qui sifflent, des qui jacassent, d'autres qui cancanent…., des noirs et blancs, des en couleurs
- et ceux qui volent pas, qui nagent ou qui courent?
Et un dernier petit malin d'en rajouter:
- vous oubliez le petit oiseau dont certains sont si fiers…

Alors, on ouït un grand « PLAF ».
D'une baffe bien assénée, Dieu cloua le bec de ce dernier empêcheur de roucouler en rond et déclara:
- Suffit pour aujourd'hui!
Sinon, je vous colle à la rédaction du dictionnaire.
J'ai faim, qu'on m'apporte une pizza et une bière bien fraîche et que ça saute nom de D. !

Alors, de cette maudite boule bleue, tout à la pointe d'une botte, une voix timide s'éleva
- D'accord, Monsieur Dieu, on fait fissa fissa. Mais de quelle pizza parlez-vous donc?
Le cuisinier se lança dans la lecture de toutes ses recettes de cuisine. Partant des Angéliques mots, les hommes qui débordent d'imagination avaient découvert une infinité de combinaisons possibles à partir des ingrédients terrestres
- pouvez-vous la nommer, s'il vous plaît? Ce sera beaucoup plus rapide et ça rendra bien service à mes clients

- Aaaaahh hurla Dieu, faites le taire!

A compter de ce jour, Dieu tourna résolument le dos à la terre et la laissa tomber pour se consacrer au grand Tout, l'ennui est parfois préférable aux emmer……
Vous connaissez la suite, ouragans, cyclones, guerres, atomes en fission, pollution, peuples oubliés, racisme …j’en passe et des meilleures…ah, j'allais oublier, la bourse!

Les anges s'acquittèrent docilement de leur tâche, la menèrent au bout ce qui nous permet d'en causer aujourd'hui. Il subsiste encore quelques imperfections puisque sous les mêmes mots nous ne mettons pas tout à fait les mêmes choses. On fait avec.

Petite précision:
Et Dieu créa le verbe?
Évidemment! il s'attribua le mérite de ce qui ne fonctionne pas si mal. Sinon, à quoi servirait un chef?

Quant à Lucifer, (vous aurez remarqué qu'il ne s'embarrasse pas d'un seul nom, lui), il jubile et continue à marquer des points

22/07/2008

L’homme aux semelles de vent



Clara et Llois sont deux, depuis bien longtemps. Deux contraires assemblés, elle de terre, lui de soleil.Les enfants, en grandissant, ont suivi le travail jusqu’aux villes qui ne savent ni l’air ni les couleurs d’ici. La vie coule tranquille dans cette maisonnette en bordure de village.

Clara pousse les volets tôt matin, le moment le plus savoureux de la journée, dit-elle. L’heure au parfum
de rosée sur terre fraîche avant que la chaleur n’éveille les senteurs fortes de garrigue et de résine.Elle s’accoude sur le rebord de la fenêtre laissant couler en désordre matin ses cheveux qui se jouent de la fluidité de la brise, flottant autour d’un visage encore frais aux joues tendrement rondes et dorées du grand air.Narines déployées à l’air qui court la campagne, elle caresse à la dérive de ses yeux de noisette chaude les grands chênes de la suberaie*. Les troncs au liège fraîchement levé déchirent de longues verticales sang le flanc de la montagne.

Un reste de neige sur le Canigou découpe à vif le ciel bleu tramontane, le bleu d’été flamboyant et brûlant des yeux de Llois.

Elle se souvient… de ce bleu d’il y a 30 ans, toujours
ouvert au tendre de ce visage taillé à la serpe des ans…de sa silhouette dégingandée, cette démarche ample et souple de grand fauve effleurant à peine le sol. Lui avait remarqué les yeux aux éclats d’automne, les cheveux feu et les gouttes de soleil semées sur son visage « comme si tu regardais le soleil à travers une passoire ! » la taquinait-il.Elle était sans cesse en mouvement, virevoltant, passant d’un bout à l’autre de la maison, insaisissable passereau.
30 ans s’installaient dans un ronronnement sans accrocs avec juste quelques pichenettes pour donner sel et poivre à la vie qui déroulait son cocon d’habitudes.
Deux bols de café noir fument, leur parfum envahit toute la cuisine.Conformément au rituel matinal, Llois sourit malicieux : « cesse de t’agiter et pose-toi là ».Il lâche 4 pierres de sucre dans son café, Clara s’indigne.Il taille 2 larges tartines et un morceau de fromage de brebis, déjeune en silence et avale le café tiédi. Il se lève. La terre du jardin doit encore coller des pluies de la veille. Ce jardin, sa fierté, sa passion, il le cultive pieds nus pour mieux en goûter la terre. Chaque geste est attention d’amour.Quand personne ne traîne dans les parages, il parle à ses légumes, demande à limaces, escargots et autres empêcheurs de pousser en paix leur demandant de respecter l’enclos de roseaux tissés.« je vous ai laissé un large pan de friche, vous avez là de quoi vous ravitailler, question de respect »
Les taupes qui défonçent joyeusement la friche en question, se contentent de galeries de passage souterrains sans nuire aux racines des légumes. Il vérifie occasionnellement leur passage quand le sol s’effondre brusquement sous le pied.
Une heure passe à affiner la terre, à l’égrainer. Les mauvaises herbes n’ont pas le temps de pousser. Il cueille les légumes. Clara gardera le nécessaire et vendra le reste sur le pas de sa porte.
Llois se prépare à partir. Il chausse à regret ses pieds des brodequins de travail, indispensables à sa sécurité. Il enveloppe la lame de sa hache catalane dans un chiffon : aiguisée de la veille, elle tranche comme rasoir.
Juin est la saison de la levée du liège. Llois aime particulièrement ce travail, un métier de tradition. Rares sont ceux encore capables de le pratiquer. Ce qui lui plaît par dessus tout, c’est la relation privilégiée établie avec la forêt. Il doit connaître le bon moment pour l’écorçage mais avant toute chose trouver le geste précis et efficace respectant l’arbre : une découpe maladroite dans la « mère », un décollement mal effectué et les récoltes futures seront compromises, la survie de l’arbre même est en jeu. La levée ne concerne pas tous les chênes d’une
suberaie. Un incendie détruit les arbres privés de leur écorce, le leveur choisit donc de n’écorcer qu’un certain nombre d’arbres.
Llois pénètre dans le sous-bois à flanc de montagne. Le soleil brûlera fort aujourd’hui. Les branches sèches craquent sous ses semelles, les cailloux roulent sous la chaussure. La pente est abrupte. La sueur dégouline et pique aux yeux, les insectes s’excitent. L’odeur du tanin des arbres écorcés la veille couvre les odeurs de la forêt. Mais le plaisir est là, il marche à la rencontre de ses arbres.Il entretient un rapport presque charnel, les observe longuement, s’imprègne de leur odeur, suit du doigt les longues cicatrices naturelles qui traceront le chemin pour sa hache. Llois prend son temps, tourne autour de l’arbre pour en apprécier l’état. On ne touche pas à un arbre en mauvaise santé, la circulation de la sève en est ralentie, le liège se décollera mal et l’arbre n’y résistera pas. L’examen est positif. Llois teste son arbre: il introduit sa hache dans les fentes naturelles et vérifie si le liège se décolle correctement,. Il nettoie rapidement le pied du chêne et découpe le talon. Ensuite, il réalise la couronne, une découpe circulaire en biseau à la hauteur souhaitée. Suivant la grosseur du tronc, il prévoit la découpe de 2 ou 3 planches de liège. Les fentes bien préparées, il introduit le manche biseauté de sa hache entre le liège et la mère. Effectuant un mouvement de levier, il sépare la planche du tronc en commençant par le haut, jusqu’au talon, sans casser.
Uriel, concentré ne voit plus rien, ne sent plus rien, même pas les insectes attirés par l’humidité de sa peau, redoutables.Les planches levées, l’odeur de tanin se fait violente, le tronc de l’arbre a pris une couleur douce, aussi rose que joue d’enfant. Ce rose qui virera ensuite au rouge vif.

13 heures, le temps du casse-croûte. Le travail sur cette parcelle est presque terminé. Demain, il s’occupera de « l’émasclage* » des jeunes arbres.
Il s’adosse à un arbre et ouvre sa musette : du pain,
quelques tranches de boutifare*, une pomme.
20 mn plus tard, il reprend sa progression en forêt. Là, le nettoyage a été négligé. Uriel progresse difficilement, s’accrochant aux cistes, ajoncs, genêts et autres broussailles. Il débouche sur un espace dévasté. La terre se soulève, se creuse, les blocs de schistes, épars, hérissent les bas côtés. Des arbres abattus dressent au ciel leurs racines rompues, déchiquetées. De gros engins déposés là, immobiles au repos de midi, ont commencé à ouvrir une nouvelle piste, un accès pompier en cas d’incendie.
L’élevage ayant régressé avec l’abandon des terres, le feu trouve dans ces forêts en friche un terrain de choix pour ses dérapages d’été, menaçant les villages.
Dans une excavation, nichée sous des racines, Llois aperçoit une paire de chaussures abandonnées, sûrement par un ouvrier du chantier pense-t-il. Il ne s’expliquera jamais ce qui le pousse à les enfiler. Il rit d’abord de son enfantillage mais retrouve son sérieux, saisi par une sensation étrange.
Sous la plante de son pied, entre peau et semelle, le vent glisse fluide et libre comme en campagne découverte. Captivé, il réalise que ses pieds décollent du sol, oh, très peu, 2 à 3cm tout au plus. Intrigué, Llois se concentre sur le phénomène qui s’accentue, à tel point qu’au moindre mouvement, le déséquilibre le couche à terre. Pas un instant il songe à enlever ces étranges chaussures .
Subjugué, il poursuit ses essais jusqu’à rester debout, titubant mais debout.
Le soleil se fond de pourpre derrière le sommet du canigou.
Llois réalise alors qu’il a « joué » plus de temps qu’il n’aurait cru. Il n’a pas travaillé de l’après-midi mais il faut rentrer, Clara doit commencer à s’inquiéter. Il se déchausse, va pour replacer les chaussures là où il les a trouvées, se ravise et les enfouit dans sa musette.

De retour à la maison, il garde le silence sur cette aventure et reprend son train-train habituel.

Le lendemain matin, il ne dit mot quand sa femme s’attarde à la fenêtre. Les yeux dans le vague, il suit la vapeur qui se dégage du bol de café. Il n’avale rien d’autre, se lève et repart en forêt sans même jeter un œil au potager.
Clara, étonnée, le suit des yeux.
Parvenu à l’écart du village, Llois gagné par l’impatience,se dissimule
derrière un buisson et reprend les chaussures. Le charme opère immédiatement, beaucoup plus puissant que la veille. Il reprend son entraînement. Encore quelques chutes, petit à petit il gagne en équilibre et, posé sur le souffle, commence à avancer, un peu à la façon dont l’enfant cherche ses premiers pas. Il est de plus en plus troublé mais ne veut pas renoncer. Il rentre à nuit tombée.
Clara, assise sur la pierre de la porte le guette depuis longtemps. Lui, comme en état d’hypnose, ne l’aperçoit même pas. Il pousse la porte et se met à table, en silence, les yeux grands ouverts au vide d’un monde qu’il est seul à connaître. Le lendemain, les volets ne sont pas encore poussés, qu’il est déjà en chemin. Il ne prend même pas sa hache, négligemment posée la veille sur le banc.
Cette fois, les effets des chaussures sont immédiats, Llois décolle du sol sans problème.
C’est le jour des arbres. Il gambade sur les cimes aussi léger que l’écureuil, ne décoiffant pas les nids d’oiseaux. Dans le bruissement léger des feuillages, il se laisse balancer par la brise marine se grisant de l’odeur du tanin de ses chênes, bien plus intense et enivrante qu’au sol .Oubliée l’ombre des sous-bois, les insectes féroces, Llois flirte avec le soleil.

Il revient avec les ombres, celles qui roulent sur la campagne à nuit tombée. Ce soir, les chiens hurlent à la lune. Clara, figée sur la pierre laisse aller ses doigts: elle avait pris son tricot pour l'attendre et ses doigts bien rôdés à l’ouvrage poursuivent leur tache dans l’obscurité. Les yeux ternis dans un visage arrondi et argenté de lune guettent l’orée de la forêt. Les aiguilles cliquètent, le corps se raidit d'angoisse. Llois passe, sans la voir.
Et les jours se succèdent, hier, comme aujourd’hui et demain, plus rien ne les différencie. Llois se consacre uniquement à son nouveau pouvoir. Une bonne quinzaine de jours s'écoulent en haute montagne, à chevaucher les cimes, dégringoler les vallées, souffler l’eau des torrents. Il caresse les dernières neiges sur les pentes nord du Canigou, lui qui n’a pour ainsi dire jamais quitté sa vallée !
Il ne sait plus combien de temps il donna à la mer.
Ne connaissant d’eau que les caprices du Tech et le canal d’arrosage du village, il s’interroge sur la mouvance et les perpétuels changements de couleur de cette masse liquide, se demande si le ciel donne ses couleurs à la mer ou si la mer travaille les nuances du ciel. Il ne s’approche jamais trop près du moutonnement des vagues. Il ne sait pas nager et il redoute les remous et tourbillons imprévisibles générés par ses semelles de vent. Un peu frustré, il se rattrape en se mesurant aux ailes blanches des voiliers qui caressent la mer d’Argelès à Collioure.
Seule la nuit lui échappe. Quand les vents tombent avec le crépuscule, les chaussures se vident et il doit prévoir la proximité de son village pour se poser en douceur.
Un soir, Clara réalise que le jardin retourne à la friche. Les taupes défoncent sans se gêner la terre du jardin dont les limites ont éclaté. Voyant Llois approcher, elle demande « arrête de courir et pose-toi là ».

Mais la tête grisée des courses folles de la journée, ivre de lumière et de vent, il n’entend pas et rentre sans un regard. Chaque soir Clara demande. Puis, seul son geste de la main accompagne le regard suppliant.
L’été écroule sa chaleur au seuil de septembre. La maisonnette a perdu ses couleurs vives, les tuiles chahutées par la tramontane menacent de tomber. Clara, les yeux clos ne voit que le vide, ses mains croisées sur les genoux ne demandent plus.
A la fin septembre, Llois qui a beaucoup vu, beaucoup bougé s’aperçoit qu’il vit à nouveau d’ habitudes, reproduites chaque jour qui vient. Les sensations s’émoussent, il connaît chaque coin et recoin de sa terre. Une si belle terre. Il comprend que s’il pousse plus loin son exploration, il
entrera dans une errance interminable, celle de tous les vents du monde.
Ce soir là, gagné par la lassitude, il revient un peu plus tôt. Il trouve Clara, toujours sur la pierre de la porte, ne bougeant pas un cil de ses yeux clos, muette, couleur de la poussière des chemins. Un souffle glacé traverse alors les chaussures que Llois a oublié d’enlever. Une spirale de vent s’enroule autour de sa femme et il assiste médusé à sa métamorphose. Clara se désagrège en une poussière d’argent qui se disperse à la brise du soir.

Llois retombe brusquement au sol, convaincu que tout rentrera dans l’ordre s’il se replonge dans leur quotidien d’avant les chaussures du vent. Dès l’aube, il est au travail : il repousse la friche dans ses limites, réajuste les tuiles de la toiture, peint de couleurs vives façade et volets.
Quand le soir tombe, il se pose sur la pierre de sa porte. Il n’a plus besoin des chaussures du vent pour porter ses rêves. Il retrouve Clara et ses virevoltes dans le vol des hirondelles, dessine son visage dans les nuages lourds, chargés de mer, entend son rire dans les rires d’enfants à la sortie des écoles. La nuit, il suit la danse des lucioles, frissonne au vol à caresse de soie des chauves-souris, voit les points d’or de ses yeux se refléter en chaque étoile. Comme si Clara pleurait d’elle de jour et de nuit.
Lui espère... espère qu’à son tour elle chevauche sur les ailes du rêve le temps de s’apercevoir de l’ordre revenu dans la maison et le jardin. Et que lui, son amour, attend.Toute sa volonté est tendue à penser qu’elle n'est pas seulement cette poussière qui virevolte au vent gelé de l’hiver tout proche.
Les jours passent. Les hirondelles ont migré, les chauves-souris dorment leur hiver dans la grange. Seules les étoiles restent là, scintillant dans la nuit froide.
Petit à petit, Llois se pétrifie dans l’attente, le bleu de ses yeux se décolore, ses joues se creusent.
.....
Et par un soir de grande
tramontane…….


Suberaie: plantation de chênes-liège
émasclage: levée du liège sur les jeunes chênes. Ce liège est inutilisable
boutifare: sorte de boudin qui se mange froid, découpé en larges rondelles


07/02/2009

lundi 15 juin 2009

Conjonctions de coordination




Mais ou et donc Ornicar?

Il a atteint le sommet
De ma patience, ah mais!

J’l’ai cherché j’dirai pas où!
Sûr, qu’il va me rendre fou
Mirza est un doux bijou
Lui? Un vrai passe-partout

Levé à potron-minet
J’vous en file mon billet
J’ai fouillé tous les bosquets
Sans le voir se faux-filet

je gémis de son abandon
Ce sale petit lardon
a-t-il coupé le cordon?
Donc, juré,pas de pardon

Et jamais au grand jamais
Je ne crierai désormais
Mais ou et donc Ornicar?

Je n’suis plus con
Sans jonction
de nos corps
Je te le dis
Tu me donnas
Trop d’affliction

dimanche 14 juin 2009

pronoms relatifs


Qui que tu sois
Eh ! qui va lent taquinant les acquis et qui libre liquide les quiproquos, démaquille les mots?
Quiconque taquine le verbe quitte à le déquiller s’enquiquine en équilibres instables jusqu’au sauve-qui-peut de l’inquisition grammaticale.

a) Querelle risque-tout
Une gigantesque bourrique sans éthique claque une romantique pathétique qui y craque quelques quenottes et crache quelques noms aérodynamiques sans souci de la linguistique. Cet antipathique astique, c’est classique, une supplique lyrique pour être quitte sans risque

b)Quoi encore!
Pourquoi, quoi qu’il fasse, quoiqu’il dise elle reste coi, décoiffée par sa mauvaise foi et son escouade de couacs? Couarde, elle se planque sous la couette, fonde une coalition entre elle et elle, se recoiffe et narquoise….

c)Dont acte
« Étant donné le bidon qui masque ton espadon, il y a maldonne. J’abandonne le bourdon pour le bourbon et je me donnerai sans pardonner au premier gardon amidonné. Je ne serai donc plus ton édredon, don Quichotte sans aiguillon! »

d) suis-je
« Ébrouée doucettement sans éclaboussures, je m’éboule enjouée langoureuse dans la mousseline et sans mouron me faire, je m’absous sans embrouille, ouverte à tout fougueux pastoureau énamouré. Où chalouper pour te trouver, t’amadouer et te savourer comme petit four?? »

e)Lequel de vous deux
« Quelquefois le quelque-chose en plus rend nickel le quelconque ou l’abominable. Entre les deux mon cœur tique taque comme un vieux juque-box. Pour lequel de ces coquelets vais-je coquelucher et claqueller du bec? »

(Si entre les deux son petit cœur acquiesce pour qui que ce soit, la suite en « a »… révision)

Quoi qu’il en soit se pronom sait sur la vie qui va, sans superlatif, subordonne au relatif

jeudi 11 juin 2009

habitudes: texte 2



La difficulté de faire état des habitudes anti-routine, c’est qu’elles ne se manifestent jamais à l’identique. Elles dépendent du moment, de la lumière, du temps, des rencontres. En fait ce sont des habitudes toujours inhabituelles. Dégustation d’instants du quotidien ordinaire

Happée
Petit jour blanc pointant satin bleu grandiose
Volets espagnolette de nuit à senteur de roses
Habillée
De frisson au frais du pavé sous les pieds nus
Bouche en accroche-coeur avide d’inconnu
Hardiesse
Des hirondelles, jets tendus de l’aurore
Rondes virtuoses en chants insectivores
Harmonie
Les crocs de la montagne enfouie, friandise
Nuages chantilly liés à la brise
Halo
Porcelaine, café brûlant toute vapeur
Fondue chocolat noir sur lèvre au coin rieur

Biscuit
Pour le chien, ébouriffer ses poils, caresse
Dévaler l’escalier quatre à quatre, ivresse
Bicolore
Au seuil des fleurs, bleu ipomée et blanc jasmin
Odeur de la terre, froisser le romarin
Bienvenue
En allongeant le pas, bonjour aux inconnus
La rue, les pavés, l’eau du canal contenue
Bigarrures
De fleurs oubliées par la lame faucheuse,
Main pleine d’herbes folles brodeuses d’été
Bientôt
Midi carillonne de cloches à la volée
Saveur olive de la rue, oignon doré

Tue-tête
Cris dégoulinants d’enfants, école en pause
Un ballon pour ricochés sur portes closes
Tulle
Fenêtres ouvertes, vent courant de bas en haut
Les rideaux en fuite flottant pianissimo
Turquoise
La marche du soir mains ouvertes et yeux fermés
Absorber le ruban bleu horizon, charmée
Tutoyer
Le ciel ombre, lumière, aux feuilles balancées
Ruisseau glacé course du chien, éclaboussée
Turbulence
D’odeurs superposées strates millefeuille
Cistes épicés, sucres en chèvrefeuille

Deviner
Bruit de la clé, ma vieille voisine aux aguets
Prendre le temps, posée sur la pierre carrée
Deviser
Écouter le temps, le temps du tout et du rien
Le temps des absents, celui d’un passé lointain
Demander
Les nouvelles des proches en virtuels canaux
Jeté de rimes sur toile, envol de mots
De ci delà
Papillonner la nuit offerte sésame
A rouler les rêves sur coussin de plumes
Demain
Je me conjuguerai au jour le jour levé
En habitudes tendrement interrogées



« J’appelle caractère d’un homme sa manière habituelle d’aller à la chasse au bonheur » Vie de Henry Brulard(1835-1836) Citation de Henry Beyle dit Stendhal

vendredi 22 mai 2009

Habitudes : texte 1

Suite à une discussion animée entre amis sur les habitudes j'ai envisagé deux possibilités: les habitudes sclérosantes et les autres, celles qui donnent sel à la vie par tous les petits bonheurs que l'on cueille. Donc, un premier texte

« Faire trop longtemps la même chose, au même endroit, à la même heure, cela rend vieux.»
Christian Bobin



Habillée, toute endormie par la routine
Altérée à l’eau glauque d’années répétées
Aveuglée par les sensations instituées
Ankylosée d’attitudes gélatine
Je sombre figée dans le quotidien
De ces jours sans début ni faim

Bipède centrée sur une vie morbide
Bigleuse à l’affût de l’aiguille pendule
Bichonnant dur cette carapace en bulle
Bicoque creuse pour tête emplie de vide
Sans bouger un seul mot à ma page
Je coule dans l’engrenage



Tuber les heures posées rails parallèles
Tuer l’insolite et bannir les surprises
Tuméfier, liquéfier la matière grise
Tunnel glacé d’un temps à briser les ailes
J’imprime mes aujourd’hui sans envies
Sur la route déjà suivie

Demi-mesure, demi-longueur sans déraison
Demi-soupir, à demi-mot au demi-jour
Demi-place, en demi-teinte sans demi-tour
Demi-soupir, demi-mal, jusqu’à crevaison

Les habitudes d’hier, aujourd’hui et demain
Forgent la petite mort en un tour de mains

mercredi 13 mai 2009

mon myspace




Je ne ...pas


Je ne crèverai pas le sac plastique de ta poubelle
aux marches des escaliers de ton immeuble
Je n'introduirai pas au matin de ton réveil
le journal à l'encre noirci des catastrophes du monde
Je n'aspirerai pas la poussière du temps qui passe
sous les meubles de ta salle à manger
Je ne règlerai pas les factures à la lumière
de tes longues nuits d'insomnie
Je ne changerai pas le joint du robinet
d'eaux troubles trop tièdes pour noyer ton ennui
Je ne baptiserai pas ton lit à la mauvaise haleine
des réveils matin avant les départs au travail
Je ne m'encolèrerai pas sur la bête plastique
qui sonne pour ne rien dire quand il ne faut pas
Je ne cueillerai pas au revers de ta veste
les cheveux de ton indifférence pour les couper en quatre

Je veux de toi
La transparence douce de mes moments d'attente
dos tendu à la terre pour les vibrations de la cage ascenseur qui te ramène
Mon mal au coeur dans mes nausées à ton absence
et ma peur de te voir oublier de me dire je te pense
Mon doigt qui frôle la peau rude de ton cou
pour desserrer le noeud cravate de ton sérieux affiché
Tes mains victoires sur le temps qui ouvrent
à la transcription matricielle de tes regard dans l'amour
Et ton cri
Tout ce que tu ne veux pas,
tout ce que tu ne peux pas
Tout ce que tu ne sais pas
Tout ce que je ne sais pas
Tout ce qui fait que je te cherche encore

Mon petit Tout


Mon grand Tout commence
par un Tout petit bout.
Une enfant pâquerette a avalé Tout un coin de ciel bleu,
le regardant Tout droit, les yeux dans les yeux.
Gratouillant la terre du tendre bout de la pulpe de Tous ses doigts,
elle a feuilleté page à page Tous les brins de l'herbe du pré
A rampé Tout au fond, à l'essentiel des découvertes.
Puisant à la perle de ses joues Tout le sel de mes baisers,
elle a plissé en Toute tendresse le bout de son nez,
a déposé le Tout en une seule goutte de rosée
puis a froncé Tout doux deux sourcils circonflexes
pour entrer Tout entière
dans le cœur soleil de sa Toute première fleur

J’suis cocue, les filles


J’suis cocue, les filles
J’suis cocue
J’ai à nouveau l’œil qui brille
Lancé droit mes banderilles
Chassé comme escarbille
Cet homme de pacotille
Pas à culpabiliser
Balancer tous ses paquets
Tout en bas de l’escalier
De mon home licencié

J’suis cornue, les filles
J’suis cornue

Finis tous ses maux de bide
Ses problèmes de carotide
Et quelques odeurs fétides
A faire rêver d’homicide

Les «tu sais je n’en peux plus »
Les «j’suis vermoulu-moulu, »
Les « ben, ça, c’est exclu »
Qui collent au cul tout comme glu

J’suis coiffée, les filles
J’suis coiffée

M’endormir sans ronflements
M’éveiller sans coassements
M’arc-bouter sans gémissements
M’étirer sans aboiements

Prendre sa place dans le lit
Bras en croix toute la nuit
Tendrement guetter la lune
Chantonner je suis plus qu’une

J’suis cocue, les filles
J’suis cocue
Cornue, blousée, coiffée, poirée
Oui mais,

J’ai toujours la taille fine,
Oeil brillant, jambe badine
J’ai délesté mes larges poches,
Raccroché mes vieilles galoches
Rehaussé mes yeux de khol
Raccroché tous mes bémols
Pour chausser mes espadrilles,
Jupon battant la cheville

Alors, si toi aussi, la fille,
Ton mari ou amant camomille
Bernard, Louis, Cédric ou Gontran,
Pas trop moche cependant,
Pour aider une copine
Je peux jouer l’adultérine

Tu s’ras cocue, ma fille,
Tu s’ras cocue

Et ce soir-là
Frangine,
Œil brillant, et taille fine
Abandonne l’aspirine
Pour fredaines extra-fines
......................................................................................
DriNNNGGGG... évidemment que je m'occupe d'abord des copines...

« Mieux vaut être cocu que quincailler, ça fait moins
de bruit quand on déménage » Rémi Pacthod

Sans dessus -dessous



Tous sens s’emballent et rayonnent
Sans dessus dessous bouillonnent
Je ne te sais pas d’hier
Mais je pose la première
Une main droite
Si maladroite

Je guette pour toutes saveurs semées
Musiques couleurs vives renversées
Chacune des rues à angle croisé
Écoute ouverte rose et lavande
La mi nuit clinquante sarabande
De ses notes parfumées palpite
Fragilité blancheur clématite
Chant éclatant sucre d’été gorgé
Balancement du grand plaqueminier
L’or couchant des kakis murs dépose
Larges éclaboussures virtuoses

Le sans dessus dessous des sens
D’incertitudes fragrances
Tu ne sais que l’aujourd’hui
Pourtant tu offres sans bruit
Une main droite
A ma main droite

Comme notes lancées hirondelles
Noires et blanches agitent sous le vent
Le fil ténu découvertes élan
Le jour s’écoule long en mal de toi
Palpite câline source d’émoi
Ton absence court les chemins semés
De si et de la musique affamée
Partition lignes de vie en prise
Portée perdue à la mi voix devise
Déchirure éclair dos à dos butoir
De tous les au revoir en désespoirs

Et nos voix murmurent croisées
Les sens dessus dessous soudés
Le présent corde sa lyre
D’ amour le temps s’étire
De ma main gauche
A ta main gauche

La vue ne craches plus nuages cendres
Trait au pinceau pour l’espace tendre
Éclabousser carmin droit aux étoiles
Pointer ciel outremer robe de voiles
Pimenter soleil armer arc-en-ciel
L’avenir de formes essentielles
Roule ruisseau en vacance d’orages
Danse les rames de l’orme tangage

Tendue à espérer acquise
Bleu sourire ouvert je vise
La bouche au clair tes yeux
Porte dérobée l’aveu
Ouvre main gauche
Sur ma main gauche

Suivant un long trait qui glisse agile
Du doigt point d’interrogation je file
Rais de blanc tissant ma chevelure
Jetant des certitudes l’armure
Nos mains se dérobent pour jeu d’enfant
Sens dessus dessous tendresse ouvrant
Le souffle vole de terre à nuages
Semant ses graines de mots en partage

Pyramide de mains
Sans voir début ni fin
Pour chaque jour qui vient

Rupture


Le passé dégouline du présent,
transparence de l'air au glacé de la nuit.
Il se pavane dans l'idiotie d'une lune
béate en mal de nuages rosés.
Il pose sa main oisive sur un tronc raviné.
De la souche du vieux merisier
lèvent trois fûts d'ennui à ramure échevelée.

Ce temps de la mort se nourrit
dans l'absence de lumière blanche
Il pénètre la brise éphémère
en grande parade pour stopper,
à la limite du filet des larmes
Il balance au large une voilure de façade.
Sa griffe masquée se joue des apparences

La haine rampe aux noeuds du délire
éjaculant les cadavres du passé
Rien, non rien n'échappe à ses crocs tendus.
Son avidité engloutit la douceur des matins,
efface jusqu'au regard de l'enfant surpris au saut du lit
L'indécence des vieilles rancoeurs perdure
dans la chair même du ressenti,
vibrant encore la non existence de ce couple agonie
L'appât du vide exerce à l'envie une fascination morbide

Puis vient le présent,
l'instant choisi pour
sortir de la plainte des paroles hors sens
abandonner la banalité du paraître
dérober le semblant aux faux semblants

L'heure d'ouvrir la porte
au gel qui prend son temps,
courant chaque brin d'herbe
nappant de sucre glace la campagne d'avril.

Bâiller au présent
Ecarquiller les yeux
Ouvrir large la bouche,
Retrouver le goût de l'eau et du sel

comptine d'avril à mai


Un deux trois
nous irons au bois
Cueillir le loup, le loup garou
A voir s’il vaut encore un clou.
Pour le muguet sauvage
Je repasserai quand j’aurai l’âge
L’âge de devenir sage
De savoir tourner la page

Sainte Gudule que de regrets
Nos saisons trop décalées
Ne sont plus ce qu’elles étaient
Et nous voilà bien marries
En ce bon mois de Marie

Quatre cinq six
Cueillir des cerises
Mais quand vous serez trop mûres
Pour aimer sous la ramure
Vous aurez fait votre temps.
Cela deviendra dur et peu fréquent
De décrocher un minet
After shave fleurant boisé.

Saint Ursule que d’égarées!
Les saisons pour cavaler
Ne sont plus ce qu’elles étaient
Nous en voilà bien navrées
En ce joli mois de mai

Sept huit neuf
Dans un panier neuf
Nous n’y mettrons pas tous nos œufs
Soyons prudentes, il vaut mieux mieux.
Nous avons couru dès l’aube
Griffé nos mollets, déchiré nos robes
Nous en retournons déçues
Nous n’avons rien aperçu.

Sainte Bidul’ qu’y pouvons-nous
Pour courir le guilledou
Les jeunes mecs à draguer
Campent devant la télé
En ce joli mois de mai.



Dix onze douze
Elles sont toutes rouges
On nous a bien embobinées
Nos grands-mères nous ont conté
De belles histoires à dormir debout
Fables à nous bourrer le mou.
Les loups ne courent plus les bois
En tout cas près de chez moi.



Nous n’irons plus au bois, les lauriers sont fleuris
La belle que voilà restera dans son lit.
À compter de ce jour nous l’avons décidé
Courons les boîtes et les cafés
Vive les grasses matinées
Suite des nuits bien arrosées.
Et si on te dit « en avril
Ne te découvre pas d’un fil »
Patiente s’il te plaît
Au joli mois de mai,
Tu fais ce qu’il te plait

Oh! joli mois de mai!
Oh! Doux mois de Marie!

A toi l’artiste


A toi l’artiste
Toi qui ne mets pas ta musique en tubes
Mots ketchup
Musique mayonnaise
Toi qui flirtes à la vache enragée,
Enragée de habitudes

Habitudes vendues
Comme paquets de chips
Ça craque gras
Ça colle aux doigts
Ça pourrit la tête
Ça pourrit le cœur
Ça gèle la pensée
Ça stérilise l’imaginaire
Ça rend sage

Tu n’es pas en concentré
Consigné
Dans ce
Bip insolent portable
Qui crache à la rue
Ses ritournelles aigres
Jetant aux oreilles passantes
Les mots d’une intimité frelatée

Aux sans dessus-dessous
Des oublieurs du sens

Narguant la mode
Des ravageurs d’idées
La mode virevolte
Qui tue les éphémères

Tutoyant les mots et les notes
Tu enchantes nos nuits
Cafardeuses de vide
Tu épices notre vie entubée

Tu surprends
Les mots qu’on ne sait pas
Les images qu’on ne voit plus
Les mélodies qu’on ne soupçonne pas

Tu nous souffle le rêve, les émois, les révoltes
Et,
Surfant sur tes vagues
On apprend à baguenauder
Aux creux des drailles d’une pensée
Poète
Toujours renouvelée

guerre



Le ciel plombe, la lumière trace avec peine au carreau jauni,
les camions martèlent lourdement le silence au pas de la rue

Dans cette forteresse d'angoisse courent les espoirs désaffectés,
ce jour comme un autre ouvre au bas du ventre une fenêtre brutale

A l'ombre des cailloux la révolte rumine privée de ses pavés
elle est clouée au creux des corps dans les fosses de l'or noir

Tempête à gogo sur passage à la haine, l'écriture dégoûte comme
dégoutte l'eau grise du caniveau dans cet hiver douceâtre

Tu pense la mort de l'autre et tu te figes au sein des abandons
tu ne flottes plus dans ta bulle irisée, te vivant maître des vents

Qui est ce monceau de nourritures
accumulées surgelées, conservées, stérilisées ?
Qui est cette peur immonde armant les bras de la guerre
déroulant coquille sur coquille pour protéger un ventre mou ?

Choisir
et penser sa complétude dans l'existence de tous les êtres

Risquer
et arrêter ce jeu de la guerre dont chaque bille coûte la peau de l'homme
Rêver
et porter des mots au parfum de café noir détalant aux pages de la nuit
Equationner
et créer des formules magiques pour accrocher des ailes aux étoiles

Chasseurs d' enfants



C'était un jour d'hier
ou un jour de demain
en tout cas,
non
je ne veux pas
ce n'est pas
le jour d'aujourd'hui
Il a sûrement perdu
pour ce soir là
La forêt aux odeurs sourdes de terre mouillée
l'eau souple de la rivière à la jointure du pâturage
la coulure des hautes herbes fuyantes sous les vents d'est
les glaciers à la dérive ruisselants des eaux lunaires
le sable des déserts pétris aux tempêtes des vents
le moment des heures bleues où se fondent terre eau et lumière
Il n'a pas d'appeau,
Il n'a pas de gibecière
Même pas de lame à dépecer les loups
Son épaule moule juste la crosse du fusil
Il chasse à l'affût
au coin de la rue
de la rue de sa ville

se claquemure
toutce qui possède une clé à tourner
et la serrure qui va avec
Tout ce qui se croit homme
Tout ce qui se croit femme
Ce soir
non
pas ce soir
La nuit en devient froide
trop froide
Le cannibalisme
a loi de cité
dans cette rue de l'homme
dans cette rue de la femme
De cet homme qui déboutonne sa chemise au sommeil
De cette femme qui endort sa tête dans l'ombre de ses cheveux
Au coin de la rue,
de la rue de cette ville
la chasse est ouverte,
la chasse à la peau
à 30 dollars la peau
la peau de ce qu'on ne veut plus comme enfant de la rue
Comme
le tir au pigeon
le tir au canard col vert
le tir au lapin de garenne
le tir aux alouettes
espèces protégées?
animaux en voie de disparition?
Alerte aux bien pensants

Ce soir le fusil claque
au coin de cette maison
à l'angle de cette rue
au crépuscule de cette ville
Traits à la craie blanche sur le tableau de chasse
30 dollars..... rendement
30 dollars..... rendement
30........
Le rythme frappé n'est plus celui des pieds de la samba
Il flotte encore aux bouches des cuisines les odeurs fortes de friture aux épices et aux piments
ce soir, l'homme a bel et bien perdu sa mémoire de l'homme

drogue



A la fête aux amandes,
tu n'es pas venue

J'ai vu le monde blasé dans sa complainte de lassitude
vendre de la poudre pour les yeux du néant

A la belle de lune,
tu n'es pas venue

J'ai senti à la veine bleutée du poignet
glisser le liquide pétrifiant de tes jeunes saisons

A la croisée de terre,
tu n'es pas venue

J'ai entendu les rêves postiches récurer ta cervelle
et griller tes dix huit ans de leurs fausses dorures

A l'aube des pervenche,
tu n'es pas venue

J'ai touché à la fragance des cendres
la nuit spirale de toutes tes errances

A la poussée de ma rage,
Je tords de mes deux poings la mort au rire aigre
qui couche au chaud de ton sein sa parure de décomposition

Petits plaisirs du jour


Un petit flocon de
Un' petit' mousse de
Un' petit' laine de
Un tout léger flocon floche de
Nuages
Un' petit' corne de
Un' petit' ronde de
Un' petit' blanche de
Un' douce petite brume de
Lune
Un petit recoin de
Un petit détour de
Un petit tintoin de
Une grande éclaboussure de
Soleil
Un petit courant de
Un p'tit panache de
Un petit passe-passe de
Un envol tourbillonnant de
Vent
Un' petit trace de
Un' petit' route de
Un' petit' toile de
Une fraîche saupoudrure de
Pluie
Au dérapage de la corne
Au recoin de la trace
Au détour de la mousse
A la brume de la pousse
Dans son tout doux cocon nuage s'endort
La ribambelle des tout petits plaisirs du jour

Attente au jardin



Il existe et je l’ai vu
Un coin de terre vivant de hautes herbes
Comme un ailleurs, un autrefois visité.
Un sentier à la largeur de mes deux pieds
Une plaque de liège en travers
S’asseoir.
Les grappes de graines en faisceaux verts balayent le ciel
Courent les nuages sous leur pinceau ,
tu sais?
Au-dessus de ma tête
L’odeur du frais de l’herbe

Les doigts fouillent la terre, humide
La terre colle aux doigts
La terre glisse sous les ongles,
Juste là où il ne faut pas,
ça fait sale,
on dit
Et je sais que je ne les brosserai pas
En tout cas pas tout de suite, j’attendrai
Je cacherai mes mains dans mes poches
J’en respirerai encore ce soir le parfum
Comme le sel de mer à la nuit des plages,
Je dis.
Le regard flotte, un peu là-haut
Deux fuseaux noirs, des martinets,
Non, deux ventres blancs et la joie des premières hirondelles

Une autre plaque de liège, en long
La largeur de deux autres pieds
Deux autres mains, rugueuses,
Un fond de bouteille coupé
Des fils dans la terre, encore emprisonnés
Deux feuilles minuscules au bout de chaque fil
Tomates ananas, Cœurs de bœuf, noires de Crimée, et…
j’ai oublié

Les deux autres mains séparent fil à fil , précision et douceur
Le temps ne se mesure plus, il coule à l’eau du ruisseau
Un bâton pour ouvrir un passage dans un pot plus grand
Le vent d’Espagne souffle chaud, il pleuvra demain
Les pots préparés s'alignent sagement
Quelques gouttes d’eau, ne pas déplacer les racines
Retour à la nursery.
Pour la pleine terre,
Attendre encore un peu

Je ferme les yeux.
J’ai la mémoire à odeur de feuilles de tomates froissées
Le jus coule et éclabousse les joues au croquer franc
Dents pleines dans la chair rouge et tiédie du soleil d’été
Attendre encore un peu


Les sillons, dans le jardin, ne pas écraser
Les pommes de terre déplient leurs pousses tendres
Balancement de grappes jaunes , colza aérien?
Non, les graines à venir pour les navets jaunes
Si tendres l’hiver, avec les carottes et les petits poireaux
Je me pose sur le bord du bassin, en forme d’escargot,
Ou de sein retourné quand il est vide,
Tu dis
Une planche de liège flotte, bouée pour écureuils imprudents
Je cueille quelques feuilles de menthe verte,
Parfum au thé vert du matin
Et la menthe coq , je confonds avec l’oseille

Je retourne quelques fraises, leur posé au sol est encore clair
Attendre encore un peu
Les petits pois sucrent sous la peau, croquer quelques grains
Attendre encore un peu
Le cerisier tend quelques fruits verts au-dessus des iris
Attendre encore un peu

Un pont de roseaux liés de rouge, tuteurs
Pour les haricots roses et blancs, grimpants,
Le parfum iris des iris violets,
La senteur vanille des iris jaunes
Le vent d’Espagne caresse le ciel de nuages pleine mer
Le temps coule encore
Tu parles
Je parle
Le chien dort sous le noyer
Une grosse branche croule au ras du sol
à la Saint-jean, avec 10 noix vertes et du vin de Lesquerde,
Du vin de noix,
Attendre encore un peu

Le temps s’immobilise, je me souviens…

Je retrouve le regard de mon grand-père,
Enchaîné à la scie hurlante de l’atelier
Le vert de ses yeux délavé par les ans
Sa présence calme à la terre
Cette longue patience en attente
Il porte sur lui l’odeur du bois,
Une odeur profonde et rude.
Au temps de la chasse, adossé au vieux chêne
Le fusil posé à terre, toujours inutile,
Prétexte
Dénouant la dernière écorce du carcan
Il s’ouvre à la forêt .
Les yeux perdus dans la haute futaie
Deux mains, rugueuses, sur les genoux
16h.
Il ouvre sa gibecière, la bouteille de muscat
De l’or au fond d’un verre

J’y trempe le bout de ma croûte de pain
J’ai dans la bouche le sucre des souvenirs
Au temps présent

vendredi 8 mai 2009

mon ombre


Mon ombre me suit ou me précède
Mon ombre est le portrait de mes vingt ans
Mon ombre ne craint pas le pas à pas du temps
Si je la cueille de mes mains tièdes
Elle fuit me laissant désabusée
Reflet émoussé
Effacé


Elle joue quatre horizons sans passé ni futur
Elle tapisse les fossés franchit les clôtures
Elle se dessine comme la ligne sans son point
Elle fripe à l’ombre des arbres comme parchemin
Elle flotte entre les eaux du jour et de la nuit
Elle frémit sans renier sa forme au gris de l’ennui

Mon ombre ouvre ma route et la balaye
Mon ombre lisse mes cicatrices
Mon ombre rit de la blessure des ronces.
Si de la pointe légère du pied
Je la caresse sans la déchirer
Sans maladresse
Tendresse

Elle précipite les rencontres en eaux vives
Elle dérive à leur surface jamais captive
Elle se rit des faux pas trébuchés et des drames
Elle ne redoute pas les creux du vague à l’âme
Elle se déploie au pur d’un azur aquarelle
Elle coule à la vie comme eau sempiternelle

Quand je sors promener mon ombre
Je fuis pour elle la pénombre
Le bas côté pour âme sombre
Qui ne se complait que dans l’ombre

Alors, en grande lumière et sans encombre
Fidèle elle me suit ou me précède, mon ombre

l'eau rage


Sens violence d’absence
La chute des apparences
Engloutit dans ses turbulences

L’eau rage
À la marge
De ma page

Notre histoire filée à l’anglaise
Coupe pilée de tes fadaises
Sang jamais sens délacer
Sens sans cesse dénoncé
Feu acéré bouleversant
D’un feu croisé agonisant
En avilissant bafouillage
Perçant fuseau de nos orages

L’eau rage
Sans ambage
À l’abordage

Le feu du corps à cœur
Tout de violence et d’humeur
Sale brouillon des désamours
Mourant dans le contre-jour
Du grand-écart à vivre à deux
Sens juste survivre cafardeux
Départ en guerre de lasse infortune
Pour déchanter de l’un à la une

L’eau rage
Sans battage
Pour bouclage

Crève le rêve et ne se pose pas
Pailleté au pas de tes pas
Mon monde ne valse plus rond
Compressé comme presse citron
Écorché sans suite détaché
De ces brèves à papier gâché
Les mots pleureront bagatelle
Pour un soir du désespoir d’elle


Et l’eau file
Coule agile
Le temps indélébile

D’argent au coeur de l’ennui
La lune se berce au creux du lit

mercredi 29 avril 2009

Sang papiers



Je gribouille en paresse à la rime
Pour coucher un poème à la frime
À l'amour, la beauté pondre un hymne
Un grand vent d'inspiration m'anime

Suis vre par le texte les images
Barbouiller de très savantes pages
Zut, je ne trouve plus le passage
Pour vous causer de ce si beau paysage

Sang demander l'aide de Benjamin
compter les pieds sur les doigts des deux mains
Trop dur, Je recalculerai demain
je garde ça au chaud dans mon sous-main

Papiers gelés dans bulle immobile
100 lieues au dessus des imbéciles
Si haut sur ma planète futile
J'accouche de deux phrases stériles

Dehors au très loin de moi la rue fait rage
On ne partage pas tous le même fromage

Je rature à la rime
frime de l'image
Rage sur ma page

La boule de papier s'anime
Gagné
Bien visé
Pile dans la corbeille à papiers

Jeté

Les mauvaises herbes


Abandonnant jardins et champs
aux plantes domestiquées et sélectionnées,
détruites aux désherbants
pour l'utile nourricier,
elles enjambent les fossés
franchissent les talus
prennent d'assaut les friches industrielles.
Ces indociles d'un monde aseptisé
de jardins publics ou pavillonnaires
en oubli de nature où tout pousse au carré
éclatent de couleurs non policées
aux graphismes intacts de jets désordonnés

Ce sont les herbes folles
couchées sous la toile en pique-nique,
foulées au cœur à corps des amoureux en maraude,
adoucissant la sieste de leur moelleux
dans la chaleur des après-midi d'été,
diffusant des senteurs odorantes,
foulées sous un pied en promenade
témoins des jeux de ballon des marmots
évadés pour un temps des cités verticales

Use et abuse, n'hésite pas
elles repoussent sans cesse,
les mauvaises herbes,
A la première pluie venue
repoussant le gravier,
verdissant les sillons aux pavés des rues
les pousses tendres glissent
en catimini au long des allées du square,
s'infiltrent dans le garde-à-vous des plantes potagères
brisent l'ordre établi
ignorent les clôtures
cassent le rectiligne
obéissent à leur loi pulsion de vie.
La terre la plus dure ne résiste pas.
Oiseaux et insectes complices
Les sèment à tire-d'ailes jusqu'à nos pots de fleurs

La main de l'homme sans regrets ni répit,
Arrache, bêche, sarcle, ratisse
Mais c'est insuffisant et toujours à reprendre
La tête de l'homme invente ces pulvérisations magiques
Désherbe intelligent jusqu'au particulier
Vaporise en ligne ses tue-herbes sélectifs
Sélectionne les meilleurs produits pour jardin propre
Trafique aux hormones de croissance
épuisant la plante la forçant à grandir
pour finir épuisée et mourir déformée

La terre se révolte
Les abeilles s'affolent
Et la source tarit
Les rivières oublient les fils d'argent
De la danse des gougeons et des ablettes
La caresse des libellules n'irise plus la surface des lacs
La mer s'offre aux méduses et aux algues toxiques
Et l'homme crève de sa démesure
Galopade effrénée du toujours plus
Du toujours plus vite

Son œil accroche encore parfois sentimental
le rouge du coquelicot
au bitume de l'autoroute sur l'aller des vacances
Jette un regard ému à l'enfants appliqué au bouquet
pâquerettes, printemps de son immeuble
La marguerite trouve encore grâce quand
je t'aime
Un peu , beaucoup, à la folie,
Plus du tout

Aujourd'hui, si tu franchis le pas hors des sentiers battus
Coule-toi modeste au ras des pâquerettes
Invente d'autres yeux
Pars à la découverte

Le soleil danse la marbrure des verts
Les fleurs du prunier sauvage nappent de frais
la raideur des fils électriques
La parcelle de ciel par la fraîcheur d'un bleuet
éclate dans la chaleur orage de bruyantes voisines
Dans la transparence solaire, un coquelicot en nostalgie
balance sous la brise son unique pétale
Les crassulas s'arrondissent de vert tendre et rosé
pour séduire une pierre qui ne résiste plus
Le chiendent s'élance et déchire le ciel
Un papillon blanc de ses trois pétales prend refuge
sous la voûte sombre et secrète du fouillis des herbes
Un éphémère géant satellise des graines parapluie
Et quelques piqûres mauves d'œillets sauvages
jouissent à contre-jour du halo solaire

Et si tu sais attendre, tu verras le ciel parsemé d'herbes folles,
S'approfondir encore et encore
Pour s'adoucir à la ouate blanche
du détour d'un nuage

La bourse ou la vie


La bourse ou la vie

Mains dressées sur les prisons d'un homme endormi
Fureur violence qui enfante les armes du massacre
Une langue inconnue, insondable barre au crayon sang
La vérité des bouches
Déchirant la pensée de ses billards de poux

Prolifération nucléaire
Partie décomposable indexée
Décroissance homothétique
Flux de produits nets
Analyse coût-avantage
Balance commerciale
Capital chômage

Des mains en vagues tristes tâchent
de chasser
De leur ciel les rapaces charognards
Jamais rassasiés
De ces

Prisons de l'ignorance
Prisons de l'imbécilité
Prisons de la destruction
Prisons de la consommation
Sans conditions

Le déséquilibre inter temporel glisse
Dans un sillage de friches stériles
Traverse l'âge des temps rapides
Ecrasant d'une pichenette des espoirs
sans futurs

Rêve de mains ouvrières
ouvrant la terre à tous
secouant le chacun endormi
Et des ponts franchissant les océans
sur des airs d'opéra

dimanche 26 avril 2009

Lune

Lune

Ce soir
je vois
la lune
se fendre
en deux
de rire

Rire salace qui capte
la mémoire
de nos journées
défuntes



défuntes de l’espoir
espoir de croire que le jour
qui sera demain
est plus clair que le jour
de ce jour

Mais elle sait
la garce,
la lune
perchée haut et clair
dans son ciel sans nuages
effacer les étoiles
qui ombrent sa clarté

Parce que
ce soir
elle a décidé
qu’elle serait
seule
à se fendre
en deux
de rire
rire de la connerie des hommes
qui ont grimpé haut
qui lui ont poché
un oeil,
son préféré, reflets bleutés

Z’en n’ont pas eu assez
d’amocher
la boule du dessous
celle
qui tournait
et boulait
de bleus et de couleurs
qui se la jouait clair de terre
à en rendre jalouse

La lune
qui se fend
en deux
de rire
de voir
terre
terne
poussière et fumée
à la dérive
ayant perdu jusqu’au clair
de
sa lune
qui se fend
en deux
de rire

Ce soir,
je crois
que
je devine
encore
un peu
la lune
qui se fend
en
et
Je
………….. rire jaune


04/09/2008

Brume rose


Brume rose

Sentir ta peau, mon amoureuse
ma tant aimée, ma langoureuse
frôler à y émerveiller
l'iris de mes yeux sitôt éveillés.
Tendre le doigt en maraude
ton suc adoré surprendre en fraude.
Au velours et soie de ton cou
me livrer entier sans tabous.

Apothéose
En brume rose


Lait blancheur au petit matin
bouche avide pendue à mon sein,
cannelle et vanille mêlés
je berce et respire mon nouveau né.
Rêvant tes à venir en chemin
j'encoquille ta main au tendre de ma main.
Je quête au voilé de tes yeux
la couleur de ta vie en je.

Symbiose
En brume rose


Je virevolte légère
grisée de mousseline éphémère.
D'un nuage traçant l'esquisse
j'ouvre amplement les bras et glisse.
Chevauchant sur l'aile des vents
tourbillonnent mes cinq ans.
Un rire musique cristal
éclate de mille pétales

Métamorphose
En brume rose


J'en appelle aux larges espaces
ma vie voilée au village crevasse.
Pièces glanées en décharges ouvertes
j'ai peaufiné dur ma mobylette.
Clandestine, mes quinze ans endiablés
roulent, désert d'or déroulé.
Le soleil rougit la poussière
le ciel boit à ma colère.

Grandiose
Brume rose




A vingt cinq ans j'ai vu pousser mes ailes.
Je balance et virevolte mes années contractuelles.
Mon rêve adolescent accompli je pilote
Avion de chasse ou bombardier, que m'importe

Sans souci
Et sans merci
Tenace
Je chasse

Je vis aux ordres
Sans en démordre
C'est ma mission
Sans digression

Un drone autonome
Implacable métronome
Piste sur le désert d'or déroulé
Nuage dansant sur terre brûlée

Le drone me l'a dit
C'est un ordre, j'obéis
Presser le lâcher de la bombe
Deux cent trente kilos qui tombent

Saute sauterelle
En explosion de cervelle.
Aquarellant mon écran vidéo
Dans le cockpit juste un halo

Virtuose
En brume rose



Fin d'une journée de braise.
Mes quatre-vingts ans me pèsent.
Je pose au pas de porte, sur mon banc
Veillant l'indocile,j'attends.
Un nuage à la dune s'anime.
J'en guette la piste infime
Ma fine fleur du désert, ma passion…
Très haut, d'argent, un avion

Nécrose
En brume rose


dans "la conduite de la guerre" William Langewiesche, explique qu'en Irak, les moyen employés sont disproportionnés. Suite à repérage de drones, sur une seule personne, une bombe de 230 kg peut être lachée. Les soldats appellent cette opération la "brume rose", parce que la bombe, en tombant sur la cible fait sur leur écran vidéo une brume rose. Livre vendu 3€, éditons Allia

08/09/2008

Soleil noir


Soleil noir,....à Josiane Nardi

Ce soir
La première
J’ai froid de toi
De toi et moi
Tripes aux abois
……..je sais

Elle
Chemine la ville
Imbécile
Immobile
Douleur en folie
Glisse
Ailes brisées
S’enlise
De lui
Désir

J’ai dans mon panier posé ce soir
Du pain à croûte épaisse
Larges tranches
Comme tu aimes
Large
Du vin nouveau
De Villargell
Parfum cerises de mai
Souvenirs
L’ail rose
Fort de parfum
Et larges gousses
Les trois dernières tomates
Rouges du jardin
Oeil sur le chemin
Je t’attends
Ce soir

Lui,
Enfermé
Menotté
À expédier
Paquet
Sans identité
Pour l’heure
A l'ailleurs
De nulle part

Les herbes de la friche sèche craqueront
Tu seras là ce soir
Tu m’as dit et j’ai vu
Deux chauves-souris
Pendues têtes en bas
Coquilles d’ailes
Au toit de l’appentis
L’eau entre
Dans le bassin
Arrosage au soir
Qui vient
Le pain tranché
Frotté d’ail et tomate
Fil d’huile d’olive
Je guette ton pas
Je t’attends
Ce soir

Elle
Tête embarbelée
Frontière
De désespoir
Une main
Une bouteille
Pas elle
De fête
Une main
Sur
Feu


J'ai deux planches pour un banc
Sciure balayée
Oublié
Ensemencer de sel
Le pain
Ombre devinée
Tu es là, tu poses là
Deux
Yeux bleus lavés
Dure journée
Joues grises à la barbe
Du soir
Ta main au dos du chien
Odeur sucrée, dernières framboises
Ma main boucle tes cheveux gris
Là,
Je n’attends plus
Ce soir

Lui
Les murs durs
Prison des espoirs
À ne plus croire
A ne plus voir
La fin
Le bout
De ce destin
Le vide
Au vide
De demain

Là,
La rue
Les cris
Le feu
Hurle
Sirènes
Le noir

Assis au même soir tombant
Deux,
Mêmes regards sur
Un sillon
Ouvert en terre fraîche
Mais,

Le soleil
Se couche
Noir
Ce soir

Suite à mesure d'expulsion, Josiane Nardi s'est immolée par le feu devant la prison de son compagnon

24/10/2008